1, Carré Cassimans
Projet curatorial au 1, Carré Cassimans, Uccle, Bruxelles - Curation : Paul Gérard
2025
Exposition collective avec : Amélie Berrodier, Kemy Obafemi, Manon Eyraud, Sarah Jackson et Paul Gérard.
Entre deux déménagements, une maison vide devient le terrain d’accueil de l’exposition « Carré Cassimans ». L’espace domestique — avec ses pièces désertées, ses murs témoins et ses interstices en attente — devient le point d’ancrage de cinq artistes qui, chacun·e à leur manière, explorent le passé, le présent et les traces laissées par celles et ceux qui traversent un lieu.
Amélie Berrodier explore les formes multiples du portrait à travers des objets, images et récits collectés. Ses œuvres mettent en tension l’intime et le collectif, la fragilité de l’instant et la persistance des souvenirs. Ici, la photographie se déploie comme un langage ambigu, oscillant entre apparition et disparition, et fait de chaque fragment un miroir possible de nos mémoires et de nos identités : chacun·e y reconnaît ou projette un reflet singulier de soi, des autres et des moments passés.
Kemy Obafemi compose à partir des objets du quotidien : textiles, meubles, clés se transforment en archives et supports de mémoire. En plaçant l’espace domestique au centre de sa pratique, elle en révèle les complexités des dynamiques familiales : lieux d’héritages, de transmissions, mais aussi de rapports de pouvoir. Ses assemblages donnent voix à des présences silencieuses, chargées de vie et de récits.
Manon Eyraud travaille une narration où la maison est à la fois une scène intérieure et un espace de projection. Sa bande dessinée, habitée par les silences familiaux et les dialogues imaginaires, déploie une mémoire fragmentée dans laquelle le réel se mêle au rêve. Entre carnet intime et fresque onirique, elle révèle comment les absences et les transmissions incomplètes façonnent nos identités.
Sarah Jackson interroge la fragilité des traces de la mémoire à travers des archives intimes et familiales. Ses photographies, souvent marquées par le temps ou recueillies dans les décombres, se transforment en surfaces incertaines où subsiste la trace d’une histoire. Entre effacement, oxydation et réactivation, elle explore comment les images survivent à la disparition, comment les récits se transmettent, se déplacent ou s’oublient. Ses œuvres, faites de fragments visuels et sonores, composent une traversée sensible de la maison d’enfance et des souvenirs qui l’habitent encore.
Paul Gérard, enfin, nous conduit dans une chambre d’enfant où le jeu et l’imaginaire deviennent refuges face aux images du monde. L’installation Rue Monrose, 62 : La Chambre, L’enfant, Le train associe film, son, dessin et circuit miniature pour plonger le·la visiteur·euse dans un espace à la fois familier et traversé de fantômes.
Réunis dans la maison Cassimans, ces cinq regards tissent un dialogue sensible entre passé et présent, mémoire et traces de disparition. La maison elle-même devient le sixième protagoniste de l’exposition : un espace où le passé et le présent cohabitent, se superposent et se promènent l’un dans l’autre, offrant à chacun·e un terrain pour la reconnaissance, la projection et la rêverie.
Texte : Paul Gérard et Emma Lozano
Images : Amélie Berrodier